Toute la poussière du chemin

Tom , comme beaucoup d’autres, est jeté sur les routes par la crise de 1929. Il a tout perdu : son travail, sa maison et même son épouse qui s’est donné la mort. Il trimballe sa douleur et sa solitude dans la poussière des chemins, à la recherche d’un boulot quel qu’il soit. Dans un wagon à bestiaux, il croise un gamin doué pour raconter les histoires de Jack London, et se retrouve nez à nez quelques moments plus tard avec le père du garçon. Mr Hammond n’a plus que peu de temps à vivre et implore Tom de retrouver son fils. Celui-ci, solitaire et misanthrope, n’en a pas moins gardé son bon cœur, et accepte de partir en quête du petit raconteur d’histoires. Sur sa route : des embûches, car tout le pays est en proie à la violence et à l’injustice…

Le dessinateur espagnol Jaime Martin et le Brésilien, Wander Antunes au scénario, mettent en scène un road movie prégnant, d’une grande intensité, qui donne à voir un visage peu glorieux des Etats-Unis des années 30. Il faut dire que l’action se déroule dans l’Etat du Mississipi, à un moment où la violence, l’injustice et le racisme ont atteint leur paroxysme, exacerbés par la conjoncture sociale et économique. L’atmosphère est lourde et tout concourt à donner cette impression : la douleur, la solitude et l’impuissance de ce héros malgré lui sont palpables tandis qu’il rencontre divers personnages, tous symptomatiques à leur manière de l’Amérique malade.  Même le trait épais, tout à fait approprié mais que l’on aurait mauvaise grâce à qualifier de « beau », ôte définitivement toute légèreté au récit. Mais si celui-ci est fortement imprégné de tristesse, il l’est aussi d’espoir et d’entêtement car Tom, derrière sa dureté, garde la volonté de conserver son humanité. Une histoire épouvantablement triste et cruelle, mais quelle histoire !

L.S.

MARTIN, Jaime et ANTUNES, Wander. Toute la poussière du chemin. Bruxelles : Dupuis, 2010. 80 p.