En Italie, il n'y a que des vrais hommes

Un journaliste et son cameraman veulent interviewer Antonio Angelicola dans le cadre d’un reportage sur la situation des homosexuels durant la période fasciste. En 1938, à Salerne, Antonio dit Ninella a repris l’atelier de couture de sa mère. Mais à la veille de la Seconde Guerre mondiale, il ne fait pas bon de déplaire à l’Ovra, la police secrète du parti fasciste italien.

Aucune loi ne punit l’homosexualité en Italie car, dans ce pays, elle n’existe pas. C’est du moins ce qu’a suggéré Mussolini quand il a prononcé cette phrase désormais célèbre : « En Italie, il n’y a que des vrais hommes ». Les homosexuels sont donc confinés, mis en isolement, loin des regards et des oreilles indiscrètes… Ninella est parmi eux et est envoyé sur l’île de San Domino delle Tremiti.

L’Italie du Duce est le pays des hommes mâles, virils et puissants. Aucune place pour les invertis dont il convient de nier superbement l’existence. La solution : les envoyer bien loin sous prétexte d’être des prisonniers politiques. Les détenus travaillent pour gagner leur pitance et nouent de solides liens d’amitié, oubliés de tous. Leur nature d’homme refusée, ce sont des sentiments d’injustice et d’humiliation qui dominent. Et pourtant, qui aurait pu croire que cette phrase d’une mauvaise foi confondante sauverait la vie de tant de personnes ?

Aucune caricature dans cette histoire dépourvue de pathos, et ce grâce à la personnalité du personnage principal, et qui s’inspire de celle vécue par Giuseppe B., inverti confiné sur une île. Le dessin simple et anguleux est secondé par des couleurs ocres et un encrage appuyé qui plongent le lecteur dans une atmosphère particulière. Sans être exceptionnel, l’album dont il est question mérite d’être lu pour le sujet méconnu qu’il aborde.

L.S.

SANTIS, Luca de et COLAONE, Sara. En Italie, il n’y a que de vrais hommes : un roman graphique sur le confinement des homosexuels à l’époque du fascisme. Bruxelles : Dargaux, 2010. 167 p.