Crime de Meyer LEVIN

21 mars 2017 Par bibliothequelaregence

Le crime du siècle qui a défrayé les chroniques en 1924 a été vécu de près par Meyer Levin. Il connaissait en effet les deux coupables car il a enquêté sur le meurtre en tant que journaliste pour le Chicago Daily News alors qu’il était étudiant dans la même faculté que les protagonistes à Chicago.

Les faits :

Deux étudiants brillants, Judah Steiner et Arthur Strauss, respectivement 19 et 18 ans ont assassiné de sang froid un jeune enfant de 8 ans : Paulie Kessler. Un crime gratuit, sans aucun mobile. Un crime qu’ils voulaient parfait.

La réalité :

Les coupables se nommaient Nathan Leopold (19 ans) et Richard Loeb (18 ans). La victime n’est pas un jeune garçon de 8 ans mais bien un adolescent de 14 ans du nom de Bobby Franks.

Le livre :

Meyer Levin attend une trentaine d’années avant d’écrire ce fait divers, il explique dans sa préface qu’il ne souhaite pas raviver la douleur des familles mais bien tenter de comprendre les comportements humains qui auraient pu pousser ces deux jeunes gens à commettre un tel crime. Sans vouloir les excuser, il s’est efforcé de rechercher les causes et les motivations qui ont amené les étudiants à exécuter un meurtre de sang froid.

L’ouvrage se divise en deux grandes parties : le crime du siècle et le procès du siècle.

Partie I :

Les faits et la vie quotidienne des familles, tant de la victime que des meurtriers, nous sont présentés dans le détail. Le lecteur ressent peu de compassion pour Judd et Artie qui préparent leur plan avec grande application. Ils sont criminels et iront jusqu’à faire porter les soupçons sur un professeur d’école. Tout au long de l’enquête, ils se renseignent auprès du reporter ou de la police pour obtenir des informations concernant l’avancement de l’investigation. Ils se croient plus malins que les enquêteurs et imprenables tels des surhommes mais (p. 133) :

La question se posait à lui [Judd] pour la première fois : s’ils n’étaient pas des êtres hors série, mais seulement des jeunes gens pareils aux autres, en vertu de quoi avaient-ils fait ce qu’ils avaient fait?

Partie II :

À ce moment du récit, aussi bien pour le narrateur que pour le lecteur, la distance est prise face aux accusés. Ils sont démasqués suite à plusieurs détails, le crime n’était donc pas parfait! À partir de cet instant, ce sont les avocats de la défense et de l’accusation qui vont prendre le devant de la scène. Jonathan Wilk, avocat de la défense, va jouer les circonstances atténuantes pour ces deux jeunes afin de leur éviter un procès devant un jury qui les condamnerait à la peine capitale. En effet, selon Wilk (p. 312) :

Qu’est-ce qu’une circonstance atténuante?

N’est-ce pas, au premier chef, la jeunesse elle-même? … Parce qu’ils sont dépourvus de jugement, faculté qui ne se forme qu’avec les années…

… je n’arrive pas à comprendre comment on peut parler de pendre des garçons à peine encore sortis de l’enfance, ainsi qu’on parlerait vacances ou courses de chevaux.

Cette fois encore, et pour la dernière de sa carrière, l’avocat va défendre un principe (p. 339) :

Par delà les deux inculpés, et peut-être même en dépit d’une aversion secrète, il se battait pour un principe, et seulement pour un principe. C’était son dernier grand procès : il allait pour la dernière fois, réclamer la pitié, toute la pitié, rien que la pitié.

Bien des sujets sont présents dans cet ouvrage, l’homosexualité, la richesse (supposée) des juifs, les répercussions d’un procès pour meurtre sur la bonne image des familles riches, l’analyse des psychiatres, etc.

Je vous laisse découvrir tout ce qui n’est pas dit ici. On connait les criminels dès le début et ce qui tient le lecteur en haleine réside dans la présentation des événements et les plaidoiries des avocats.Un fait divers qui résonne dans nos têtes comme un crime atroce…

JVD
Membre du club de lecture