Prodigieuses créatures
29 août 2011Mary ne tarda pas à se faire une place dans nos vies, nettoyant les fossiles pour moi, me revendant, dès qu’elle sut que je les appréciais, les poissons pétrifiés que son père et elle avaient trouvés. Elle m’accompagnait parfois sur la grève lorsque je partais à la chasse aux fossiles, et même si je ne lui en soufflais mot, j’étais plus rassurée quand elle était avec moi, car j’avais peur de me laisser surprendre par la marée. Mary n’avait pas cette crainte, car elle possédait un sens des marées que je ne parvins jamais vraiment à acquérir. Peut-être, pour être doté de cet instinct-là, faut-il avoir grandi avec la mer sous ses fenêtres.
Début du 19ème siècle. Elisabeth Philbot et ses deux sœurs, Louise et Margaret, ne peuvent raisonnablement pas continuer à loger chez leur frère qui vient tout juste de prendre épouse. Les trois vieilles filles quittent Londres pour Lyme Regis, petit village côtier du Dorset, au large de l’Angleterre. Bourgeoises et habituées au confort, elles doivent revoir quelque peu leur style de vie et vivre plus chichement qu’auparavant. Oisives, leurs préoccupations sont légères. Margaret ne vit que pour la danse et ne désespère pas d’encore trouver un mari à son âge, Louise prend grand soin de son jardin tandis qu’Elisabeth se découvre une passion pour les fossiles de poissons. Au cours de ses recherches, celle-ci rencontre sur la plage Mary Anning, laquelle a miraculeusement survécu à la foudre qui s’était abattue sur elle alors qu’elle était encore bébé. Dépenaillée et solitaire, la jeune fille a l’oeil vif et n’a pas son pareil pour dénicher des fossiles. Un jour, elle découvre le squelette entier d’une bête énorme et inconnue…
On se souviendra de l’étonnant Jeune fille à la perle qui fut LE succès de Tracy Chevalier et de La dame à la licorne qui l’a suivi quatre ans plus tard. Ces deux ouvrages ont ceci de commun d’introduire dans une fiction un personnage célèbre ou un événement historique avéré.
Prodigieuses créatures suit le même procédé : Mary Anning a bien survécu à la foudre étant enfant et a aussi découvert des squelettes d’ichtyosaures et de ptérodactyles. Elle a aussi connu Elisabeth Philpot, laquelle collectionnait les fossiles de poissons. Beaucoup de vérités animent donc cette fiction. L’auteur avoue avoir étalé sur 15 ans ce qui s’est passé en réalité peut-être sur 30 ou 40 ans, et ce afin de ne pas ennuyer le lecteur. Prodigieuses créatures traite de la découverte des fossiles et du statut particulier des femmes de l’époque, à la veille de la lutte pour leurs droits civiques. Une amitié improbable et pourtant bien réelle…
L.S.
CHEVALIER, Tracy. Prodigieuses créatures. Paris : Quai Voltaire, 2010. 377p.
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